
Améliorer ses habitudes
Améliorer ses habitudes
12 juillet 2021
Demander au plus jeune d’attendre pendant qu’on termine de lire un courriel pour le travail. Écouter d’une oreille distraite l’aînée qui raconte sa journée parce qu’on est absorbé par notre fil Instagram. Interrompre une conversation avec son partenaire à cause d’une notification qui apparaît sur notre cellulaire… Tout ça vous dit quelque chose?
Dans notre monde hyperconnecté, on laisse constamment les écrans interférer dans nos interactions avec les autres, incluant les membres de notre famille. Le problème, c’est que ça arrive tous les jours, voire plusieurs fois par jour, et que ç’a des répercussions sur nos relations.
Ce phénomène intéresse les spécialistes depuis plusieurs années. En 2012, le chercheur en psychologie familiale Brandon McDaniel a créé le terme technoférence pour décrire ces «interruptions quotidiennes dans les interactions interpersonnelles ou dans le temps passé ensemble en raison des dispositifs technologiques, numériques et mobiles». Ce dernier étudiait alors les effets des écrans sur les interactions dans les relations amoureuses et de coparentalité. Or, le terme a été réutilisé cinq ans plus tard dans des recherches portant sur la relation parent-enfant. «Ces études ont démontré que les interruptions quotidiennes entraînent une réelle détérioration dans la relation parent-enfant», indique Catalina Briceño, professeure à l’École des médias de l’UQAM.
Catalina Briceño a elle aussi étudié le phénomène de la technoférence pour son livre Parents dans un monde d’écrans (Éditions de l’Homme, 2019), qu’elle a coécrit avec la journaliste Marie-Claude Ducas. Au cours de leurs recherches, les auteures ont constaté que cette technoférence génère un certain malaise chez les parents, qui reconnaissent que ces «microruptures relationnelles» avec leur enfant se produisent tous les jours. «Quand l’enfant est plus jeune, c’est le parent qui les impose. Mais quand l’enfant vieillit, il les fait lui aussi subir à son parent, qui souffre de voir que son ado n’est pas disponible à la relation parce qu’il est accaparé par ses appareils», explique-t-elle en soulignant bien que, de façon générale, tout part du parent et de son propre usage des écrans.
Il faut dire qu’en matière de comportements abusifs avec les écrans, les parents ne font pas mieux que les ados. «En incluant les activités qui ne sont pas liées au travail, ils passent autant de temps, sinon plus, que leur jeune sur leurs appareils connectés», fait remarquer l’auteure. En d’autres mots, les parents, dont le rôle est d’encadrer l’usage numérique à la maison et d’enseigner à leur ado une consommation raisonnée et raisonnable des écrans, sont eux-mêmes obsédés par leurs appareils. «C’est un des grands paradoxes de la parentalité moderne», commente-t-elle.
Malheureusement, face à ce paradoxe, plusieurs parents réagissent par une forme de «démission parentale en matière d’éducation numérique», déplore Catalina Briceño. «Certains parents préfèrent éviter les conflits, d’autres se sentent dépassés, d’autres encore se sentent coupables et n’osent pas mettre des limites qu’ils sont incapables de respecter eux-mêmes.»
« Changer ses habitudes numériques peut sembler une tâche difficile. Si c’est votre cas, adoptez la méthode des petits pas en vous concentrant sur une stratégie à la fois plutôt que de vouloir tout changer du jour au lendemain. Qui sait, vous confirmerez peut-être le slogan
«l’essayer, c’est l’adopter»! »
D’après le livre « Parents dans un monde d’écrans » de Mme Catalina Briceño et Mme Marie-Claude Ducas, Les Éditions de l’Homme, 2019