Méfaits et cyberdépendance

Les réseaux sociaux: durs pour l’image corporelle

Par Équipe PAUSE en collaboration avec Andréanne Poutré, cheffe de projets chez ÉquiLibre

Les réseaux sociaux: durs pour l’image corporelle

Si vous utilisez les réseaux sociaux, vous savez que le défilement de photos retouchées finit par affecter négativement l’estime de soi et la satisfaction corporelle. Eh bien, c’est la même chose pour votre ado. En avez-vous déjà discuté ensemble? Savez-vous comment l’accompagner afin d’améliorer son expérience en ligne?

Les réseaux sociaux nous exposent à un flot continu d’images qui véhiculent des standards de beauté très peu diversifiés, soit des corps minces pour les femmes et musclés pour les hommes; des corps fermes, jeunes et sans défaut. Une majorité d’utilisateurs ont même recours à des filtres et retouchent leurs photos dans le but d’améliorer leur apparence. Or, à force de faire défiler nos fils d’actualité, on finit par intégrer cette vision déformée de la réalité… et on ressent de plus en plus d’insatisfaction par rapport à notre corps.

La fragile image corporelle des jeunes

Si les adultes n’y échappent pas, les jeunes y sont encore plus vulnérables puisqu’ils et elles traversent une période qui mêle recherche identitaire et besoin de reconnaissance de la part de leurs pairs. Une étude québécoise publiée l’an dernier a d’ailleurs montré «qu’une augmentation de l’usage des médias sociaux est associée à une baisse de l’estime de soi et à un accroissement des symptômes liés aux troubles alimentaires chez les adolescents».

Andréanne Poutré est cheffe de projets chez ÉquiLibre, un organisme qui vise entre autres à favoriser le développement d’une image corporelle positive chez les individus. Selon elle, l’incidence des réseaux sociaux sur notre estime n’est pas uniquement liée au temps d’utilisation, mais aussi à la façon dont ils sont employés. «Lorsque leur usage est davantage axé sur l’apparence – par exemple lorsqu’une personne publie beaucoup de selfies ou retouche ses photos pour améliorer son apparence –, les répercussions négatives sur l’image corporelle sont nécessairement plus importantes», mentionne-t-elle. La cheffe de projets chez ÉquiLibre ajoute que les caractéristiques individuelles entrent également en jeu: «Un jeune qui a une faible estime de lui-même à la base, qui a tendance à se comparer aux autres ou qui a internalisé les standards de beauté sera plus influencé négativement.»

Parler à votre enfant de la diversité corporelle

«La diversité corporelle n’est pas un sujet qu’on aborde forcément en famille, mais il faut prendre le temps d’en parler avec son enfant», clame Andréanne Poutré. «C’est important de valoriser la diversité naturelle des corps, dit-elle, de normaliser le fait que chaque corps est différent, unique et qu’il mérite le respect.»

On peut, par le fait même, en profiter pour déconstruire certains préjugés ou fausses croyances. «L’enfant doit savoir que le poids n’est pas quelque chose de facilement modifiable ou contrôlable, malgré ce que l’industrie de la minceur veut nous laisser croire, poursuit-elle. Ça pourrait lui enlever une certaine pression ou de la culpabilité par rapport à ça.» Puis, au quotidien, on veille à encourager de saines habitudes de vie et à valoriser notre ado pour autre chose que son apparence afin de contribuer à une estime de soi diversifiée.

7 moyens d’améliorer l’expérience des ados sur les réseaux sociaux

Évidemment, l’idée n’est pas d’interdire les réseaux sociaux à votre ado puisque ceux-ci représentent un moyen, sinon le principal moyen, de communiquer avec ses amis. Par contre, il faut faire preuve de vigilance quant à l’utilisation qu’il ou elle en fait. Andréanne Poutré soutient qu’il y a plusieurs moyens d’aider votre jeune à améliorer son expérience sur les réseaux sociaux.

  1. L’amener à prendre conscience des effets potentiellement négatifs de son usage des réseaux sociaux. Vous pouvez par exemple lui demander comment il ou elle se sent en voyant un selfie pris avec un filtre ou qui a été retouché. Est-ce qu’il ou elle se compare? Est-ce que son estime est affectée?
  2. L’encourager à faire le ménage dans ses réseaux sociaux en se désabonnant des comptes qui génèrent chez lui ou elle des émotions négatives et en privilégiant ceux qui transmettent des messages bienveillants, qui véhiculent des images réalistes et inclusives, puis qui valorisent la diversité corporelle et l’acceptation de soi. En plus d’avoir un effet positif sur son bien-être, ce petit ménage amènera les algorithmes des médias sociaux à lui montrer plus de contenu bienveillant.
  3. Lui proposer de masquer les publicités qui font la promotion de régimes et qui présentent des images peu inclusives ou qui ne sont pas le reflet de la réalité.
  4. L’inciter à commenter autre chose que l’apparence physique sur les photos et vidéos qui défilent sur son fil d’actualité. Est-ce qu’il ou elle pourrait plutôt écrire un commentaire sur les qualités de la personne, ses forces ou ses accomplissements?
  5. Lui rappeler de conserver un œil critique par rapport au contenu sur ses réseaux sociaux, qui ne montre pas nécessairement la réalité. En effet, même si l’on sait pertinemment que la plupart des photos sont retouchées ou améliorées grâce à des filtres, on l’oublie parfois, surtout les jours où l’on se sent moins bien.
  6. Lui suggérer de réduire, voire de cesser de recourir à des filtres dans le but de modifier ou d’améliorer son apparence. L’idée n’est pas de culpabiliser votre ado de les utiliser – la majorité des internautes y ont recours –, mais bien de lui faire prendre conscience qu’en plus d’affecter négativement sa perception de son corps, les filtres contribuent à entretenir des standards de beauté irréalistes.
  7. Lui conseiller de publier du contenu plus authentique et en lien avec ses intérêts et ses passions plutôt que de mettre en ligne une série de selfies. Il ou elle pourrait par exemple publier des photos d’une création ou d’une activité sportive.

Les signes d’une image corporelle négative

Plusieurs signes peuvent indiquer que votre enfant a développé une image corporelle négative (que ce soit dû aux réseaux sociaux ou non), tels que:

  • une diminution de l’estime de soi,
  • une préoccupation accrue par rapport à son apparence,
  • des changements dans son alimentation ou dans sa pratique d’activité physique dans le but de contrôler son poids.

Certains jeunes peuvent également:

  • ressentir de la honte, de la culpabilité ou de la haine par rapport à leur corps,
  • déprécier certaines parties de leur corps,
  • décortiquer leur corps plutôt que de le voir comme un tout,
  • douter de leurs habiletés physiques,
  • ne plus être à l’écoute des besoins de leur corps ou chercher à le transformer pour atteindre un idéal.

Si l’on observe ces signes chez notre jeune, c’est important d’ouvrir la discussion sur le sujet en lui faisant part de nos observations et inquiétudes, puis d’être à l’écoute de ce qu’il ou elle a à dire, sans jugement et sans minimiser les sentiments qu’il ou elle ressent par rapport à son corps. «Aussi, on peut lui demander quelle est son utilisation des réseaux sociaux, ce qu’il ou elle regarde et publie, pour essayer de l’accompagner afin que les conséquences soient le moins négatives possible… et peut-être même positives grâce à du contenu bienveillant et qui fait la promotion de la diversité corporelle», indique Andréanne Poutré.

Si vous ou votre ado vivez des difficultés en lien avec votre image corporelle ou un trouble alimentaire, n’hésitez pas à contacter la ligne d’écoute et de références d’Anorexie et boulimie Québec (ANEB) au 1 800 630-0907. Vous pouvez également suivre l’organisme ÉquiLibre sur Instagram et Facebook.

Andréanne Poutré est cheffe de projets chez ÉquiLibre.