Méfaits et cyberdépendance

Trop d’écrans nuit au développement des tout-petits

Par équipe PAUSE, en collaboration avec Caroline Fitzpatrick, Ph. D.

Trois enfants en bas age qui fixe un ordinateur portable

Les plus récentes études québécoises concernant les habitudes numériques des enfants d’âge préscolaire montrent qu’une surutilisation des écrans pose un risque pour leur développement global.

Les tablettes et téléphones intelligents sont de plus en plus utilisés par les tout-petits et les toutes-petites. En effet, bon nombre d’enfants d’âge préscolaire possèdent leur propre appareil et plusieurs parents n’hésitent pas à leur prêter leur cellulaire, autant à la maison que lors des sorties.

Ces habitudes amènent plusieurs enfants à dépasser les recommandations des spécialistes, soit zéro temps d’écran avant l’âge de 2 ans et 1 heure par jour maximum pour les 2 à 5 ans.

Temps d’écran des tout-petits et pandémie

Une enquête sur les habitudes numériques des enfants d’âge préscolaire a été menée durant la pandémie sous la direction de Caroline Fitzpatrick, membre du comité d’experts et d’expertes de PAUSE ainsi que titulaire de la Chaire de recherche du Canada sur le vivre-ensemble, les médias numériques et les enfants: vision écosystémique.

Entre 2020 et 2022 , son équipe a suivi 315 enfants de 3 ans et demi (au début de l’étude) résidant en Nouvelle-Écosse. Parmi les constats:

  • seulement 15 % ont respecté la recommandation de 1 heure ou moins de temps d’écran par jour;
  • environ 50 % des enfants ont utilisé les écrans entre 1 et 4 heures par jour, et le tiers y a consacré plus de 4 heures par jour;
  • 56 % des enfants ont été exposés et exposées aux écrans durant leur routine de sommeil tous les jours ou presque, alors que les spécialistes recommandent de les éviter 1 heure avant le dodo.

Effets des écrans sur les enfants: moins d’attention et difficile gestion des émotions

Il était normal de voir un temps d’écran plus important au plus fort de la pandémie. Or, l’équipe de recherche a constaté que celui-ci n’avait pas diminué de façon significative en 2021, alors que le confinement était moins restrictif.

Les résultats de l’enquête ont également permis de mieux comprendre les conséquences d’une surutilisation des écrans sur le développement des tout-petits et toutes-petites. Il en est ressorti que les enfants ayant respecté la recommandation de 1 heure par jour étaient moins susceptibles, à leur entrée à l’école, de montrer un retard de développement global (ex.: habiletés physiques, sociales et langagières; capacité de résolution de problèmes). Au contraire, les enfants qui ont utilisé les écrans entre 1 et 4 heures par jour y étaient significativement plus à risque.

L’équipe a aussi noté que, plus les enfants ont passé de temps devant les écrans, moins ils et elles ont réussi à diriger et à maintenir leur attention et moins ils et elles ont été en mesure de gérer leurs sentiments de colère et de frustration.

Il faut savoir que le contrôle de l’attention et des émotions découle de la capacité d’autorégulation. Celle-ci se développe durant la petite enfance lors des échanges avec les parents et des jeux hors ligne. Malheureusement, une surutilisation des écrans par les tout-petits et les toutes-petites peut réduire le temps alloué aux activités nécessaires au développement de cette compétence.

6 astuces pour mieux gérer le temps d’écran des tout-petits

Un article publié par Caroline Fitzpatrick en 2023 soutient que certaines stratégies parentales sont plus efficaces que d’autres pour encadrer le temps d’écran des enfants d’âge préscolaire et les protéger des méfaits d’une surutilisation.

Il semble en effet que les pratiques «restrictives», qui comprennent l’établissement de limites et de règles, augmentent les chances que l’enfant respecte les recommandations de temps d’écran plus tard. Voici quelques exemples d’interventions conçues pour promouvoir un développement sain dès le plus jeune âge:

1. Limitez le temps d’écran.

Appliquez les recommandations de temps d’écran en fonction de l’âge de votre enfant, puis essayez de diviser les périodes d’écoute en tranches de 30 minutes maximum.

2. Précisez les moments de visionnement.

Identifiez des périodes dans votre routine familiale qui sont propices à l’utilisation d’un écran par votre enfant (ex.: 30 minutes au retour de la garderie) et celles qui ne le sont pas (ex.: pendant les repas, 1 heure avant d’aller au lit).

3. Établissez des règles d’utilisation.

Vous pourriez, par exemple, dire à votre enfant de demander la permission avant d’allumer un appareil, puis lui expliquer quelles sont les émissions autorisées et celles interdites.

4. Donnez la priorité aux activités sans écran.

Encouragez votre enfant à bouger. Pensez aussi à planifier un moment de jeux parent-enfant chaque jour (si ce n’est que 15 minutes!). Fournissez-lui du matériel pour favoriser les jeux sans écran (ex.: crayons de couleur, pâte à modeler, jeux de société, blocs de construction, livres). De plus, veillez à ce que ses nuits de sommeil ne soient pas raccourcies à cause de l’usage d’un écran.

5. Sélectionnez soigneusement les émissions ou les vidéos que vous lui présenterez.

Optez pour du contenu éducatif et qui est adapté à son âge. Évitez de télécharger les jeux mobiles gratuits, qui montrent souvent des publicités et du contenu inapproprié.

6. Établissez un plan familial qui met en place les règles pour chaque enfant, selon l’âge.

Si vous avez des enfants d’âge scolaire, utilisez l’Entente d’utilisation des écrans conçue par PAUSE afin de garder le contrôle des activités numériques et favoriser votre bien-être familial.

Finalement, n’oubliez pas de donner l’exemple. Une étude publiée par Caroline Fitzpatrick en 2024 indique que les habitudes numériques des parents influencent celles de leurs enfants. Prenez donc conscience de votre propre utilisation des écrans afin de viser un usage plus équilibré… C’est toute votre famille qui en ressortira gagnante!

Caroline Fitzpatrick est professeure agrégée au département de l’enseignement au préscolaire et au primaire à l’Université de Sherbrooke. Elle est aussi titulaire de la Chaire de recherche du Canada sur le vivre-ensemble, les médias numériques et les enfants: vision écosystémique.

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